Cette année encore, pour quelques jours de congés estivaux, j'ai choisi d’échapper à la masse infâme des hordes plagistes et de partir à la rencontre de notre vénérable massif des Pyrénées. Selon le désormais rituel (2008 - Tour du Mont Perdu et 2009 - Tour du Néouvielle), je vais partager avec vous les 4 jours de randonnée « gaillarde » que j'ai réalisée début août autour et au sommet du mythique Pic du Balaïtous - le premier qui toise les 3000 mètres en venant de l’ouest de la chaîne.
Je vais vous restituer notre aventure épique en quelques 5 billets d’un récit fleuri qui saura j’espère vous captiver, vous divertir, vous faire voyager, et qui sait, peut-être vous donner envie de nous rejoindre !
(Previously, on "Tour du Balaïtous" : Le Carnet de bord, J1 - Arrêt "Moulit", J2 - Aujourd'hui, c'est bal à Ïtous, J3 - De l'ombre à la lumière)
J4 - Arriel ULTRA !
Pas de bruine ce matin. Même pas de une goutte de rosée. On a dû passer sous le zéro cette nuit car à la place, de fins flocons de glace étoilent le matelas végétal de notre campement. Mais le soleil se hisse paisiblement au-dessus des crêtes et la fonction « dégivrage » est enclenchée pour réchauffer notre dernier petit déjeuner.
On fait une halte à proximité du refuge de la veille pour faire le plein de flotte et s’avancer vers le barrage de Respumoso. Nous devons le dépasser mais d'ici là, un gang de marmottes prend la pose pour distraire nos premiers pas. De ce coté de la chaîne, la saison hivernale n’a pas dû être trop rigoureux car ces chiens de prairie là boxent assurément en catégorie « poids-lourd ». Les bestioles ne sont pas farouches et on s’étonne autant de leur proximité que de leur capacité à rentrer leur imposant tour de taille dans d’aussi menus terriers. Le surnom de « marmottes » données aux filles la veille en devient du même coup peu flatteur…
Pour ces dernières d’ailleurs, ce début de matinée à un air de déjà vu : on dévale en fait les lacets qu’elles ont gravit pour venir. Aujourd’hui, on rentre à la maison et l’objectif est de trouver une amorce de chemin à flan de versant qui nous mènera au dernier col du périple avant une ultime bascule.
A force de descendre, on se dit qu’il va falloir monter et quelques tergiversations plus tard, on rentre dans le vis du sujet en attaquant une raide pente qui serpente en cernes serrées à l'ombre d'une bienveillante ombrelle boisée. Deuxième effet « Kiss Cool », on entend même une cascade qui ruisselle sur notre gauche.
Mais le rythme soutenu de nos pas nous amène bien vite à une altitude où le bois s’éteint et débouche sur de rases estives qui ne laissent rien présager de confortable.
Dès le début, ce chemin n’était pas tracé sur la carte. On pouvait s'en douter maisil ne l'est guère plus sur le terrain. Et passés les quelques massifs d’iris concentrés autour du fin ruisseau qui dévale l’estive, on commence à pister plus difficilement les cairns.
Même le Basque semble avoir son détecteur en rade et on sent bien que au fil des virages, le finish se fera en free-style. Le col qu'on cible est probablement la seule difficulté de la journée et le groupe met les bouchées doubles pour l'atteindre. Dans nos pas, les nénettes nous épatent toujours un peu plus et tiennent la dragées haute à tous les barbus du grupeto.
Même si nos sacs sont plus "légers", la pente nous met au supplice et comme l'heure tourne, son copain le soleil nous brise franchement les reins de ses rudes rais. Un peu au bout du rouleau, je passe en mode "mental" et cesse d'embarrasser mon ascension d’inutiles lacets. Dans ces moments difficiles, j'ai l'impression de pousser autant sur mes jambes que sur mes indispensables bâtons de marche. Mes pas lourds peinent même parfois à éviter les innombrables colchiques qui balisent la sente, sourires floraux dans l'enfer du champ de mottes qui se dressent devant nous.
Comme souvent la montagne est joueuse, et alors qu’on croit que le dernier relief aperçu sera le col final, on s’aperçoit que ce n’est qu’une étape de plus sur notre long chemin de croix : le fameux syndrôme du "faux-col" bien connu des montagnards en détresse (existe aussi en version « faux-sommet »). Le Graal est encore à 200 mètres, mais le plus dur est fait et bien vite on se vautre sur les rocs de notre objectif entre Pic de Sobe et Pic d'Arriel. Le passage n'a pas de nom sur la carte mais présente une vue hallucinante sur ce qu'on a gravit dans la journée. Et le sommet au nom de baril de lessive nous domine de toute sa classe et promet encore bien mieux aux plus vaillants d'entre nous.
Mais seuls le couple "basque" et le landais relève le défi qui les élèvera aux 2824 m du Pic d'Arriel, point le plus haut de leur journée. Alors que les feignants attaquent un bout de saucisson, l’escouade des valeureux s’éloigne péniblement jusqu’à devenir quelques grains colorés dans l’océan d’éboulis qui lui barre l’accès au sommet. Deux carrés de chocolat et quelques discussions anodines plus tard, leur trace est perdue. Ce n'est déjà plus que dans les songes de ma sieste que je les imagine en train de nous observer du haut de leur mirador.
Courants d'air et rayons de soleil se relayent agréablement pour tempérer notre paresse et on n'attend plus que le retour des vaillants pour vider les sacs des dernières victuailles et siphonner définitivement le rouge. A écouter le récit de Peïo sur la vue offerte par ce dernier sommet, j'en viens à regretter de ne pas avoir fait l'aller/retour. Mais s'en était trop pour moi et je me contenterai de me régaler de ses photos, qui offre en effet un panorama impressionnant sur une belle partie de notre trip.
Le dessert avalé, alors que nous promenons nos regards sur la vaste plaine espagnole, une large ombre se projette sous nos yeux. C’est un vautour qui traverse, quelques pieds plus haut dans les cieux. On s’émerveille devant le majestueux spectacle de ses rondes entêtantes. Mais à peine a-t-on levé la nifle au ciel qu’un autre charognard déboule. Et 5 minutes plus tard, c’est une douzaine de méga-piafs qui tourbillonne en ronds serrés.
Nous ne réalisons ce qui se passe que quand l’escadrille fond 200 mètres plus bas sur je ne sais quelle bestiole refroidit depuis peu. Le spectacle est magique mais nous invite surtout à rembarquer nos peaux de saucisson - négligemment laissée entre deux caillasses - effrayés de pouvoir avoir affaire aux planeurs nécrophages.
On quitte le col pour franchir une dernière fois la frontière et le paysage mute encore une fois, plus aride mais offrant une vue gigantesque sur le titan de l’Ossau, loupée lors de la montée pour cause de sous-couche nuageuse tenace. La silhouette du « Jean-Pierre » - son petit surnom - n’a pas bougé. Il est planté seul dans son massif, comme un caïd qui aurait fait la place dans son quartier. Sous le soleil du mois d'août, il flambe aux yeux des foules béates qui se pressent de Soques ou d'Ayous pour l’admirer sous toutes ses facettes. Si l'aventure vous tente, prévoyez quand même une belle journée de rando...
La descente finale du grand vallon est interminable. Le trajet nous semble deux fois plus long qu’à l’aller bien qu’on le dévale au pas de gymnastique. Autant ce bol d’air de quatre jours a fait un bien fou, autant, comme après de longues vacances à l’autre bout du monde, quand vient l’heure de rentrer, le temps se met à presser.
On s’étonne de la rudesse du bois et on comprend bien que l’enthousiasme de la première heure de montée, 4 jours auparavant, a masqué la difficulté. Mais dans ce sens, c’est du gâteau. Un gâteau un peu lourd pour nos quadriceps engorgés de fatigue, mais qu’on déguste quand même pour ces dernières longueurs en liberté. Bientôt, on aperçoit les virages goudronnés qui conduisent au Pourtalet et nos autos stockées en contrebas.
A l'année prochaine pour un Tour de plus, vers l'Aneto ou... ailleurs !
2 commentaires:
Génial ! On sourit toujours autant à vos aventures. Elles nous font rêver aussi : on s'est inspiré de votre Tour dans le Néouvielle pour y faire un petit tour cet été. Nous aussi on recommence l'été prochain, mais pas forcément dans le Balaïtous...
@Valérie : merci, et n'hésitez pas à me contacter pour avoir des infos détaillées ou des idées rando, je vous donnerez tout ça vaec plaisir ! A+
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