vendredi 2 septembre 2011

Tour du Vignemale : J1 - A visto de naz...

Rejoignez moi encore une fois pour sillonner les fraîches estives pyrénéennes durant 4 jours de randonnée et autant d’aventures ! Cette rentrée, je vous propose de nous replonger au coeur de l’été pour un Tour du Vignemale épique, mais surtout magnifique.

(Previously, on "Tour du Vignemale" : le carnet de bord)

Jour 1 - A visto de naz...

Cette année, entre les lendemains de bringue qui déchantent des uns et les obligations "familiales" des autres, le rendez-vous est pris le jour même du départ, à Lourdes (65), divin carrefour de nos provinces respectives.



A 7H30, alors que la synchro entre l'équipage local (GG + Lolo) et celui toulousain (Peïo + Bouchal, pourtant partis de loin) est parfaite, Balm's - qui a ramassé Bumbet sur Tarbes - gare sa carrioles sur le parking du funiculaire avec les habituelles 15 minutes de retard qui le caractérise.



Rien de trop pénalisant puisque nous faisons aussi halte à Luz-Saint-Sauveur (65) pour ramasser quelques chocolatines et les miches de pain qui devront nous permettront de tartiner pour les 4 prochains jours.

Il n'est pas loin de 8H30 quand nous réveillons Gavarnie (65) pour atteindre dans la foulée le barrage d'Ossoue (1835 m). Enfin presque atteindre puisque le Basque se plaint déjà du parking que j'ai choisi, 500 mètres en léger contrebas du lac homonyme. Déjà trop loin pour lui semble-t-il. C'est pas comme si on allait manger plus de 50 bornes en 4 jours...


Notre Tour du Vignemale commence en free-style puisque après quelques décamètres sur le couru sentier HRP (Haute Randonnée Pyrénéénne), on doit quitter sa nette trace pour s'aventurer à droite, dans des estives au parcours plus énigmatique. Comme souvent la carte IGN ne présente qu'un louche trait de pointillés censé aider plutôt les skieurs de randonnée que les randonneurs sans ski. On repère bien une cabane deci, un modeste cairn delà, mais rien de franc et l'aventure commence "a visto de naz" comme on dit plus bas dans la vallée...


On saute un ruisseau, on attaque un rempart, on boit un trait d'eau, on joue à se faire peur en pensant croiser une vipère mais le rythme est des plus respectable.

Un oeil sur la carte, Un autre à la recherche de tas de pierres, Lolo vise maintenant le vallon d'à côté. On est même rassuré par quelques t-shirts et casquettes qu'on aperçoit plus bas et qui évoluent vers un col dont nous faisons aussi notre prochain "checkpoint".



On prend le temps d'admirer les belles crêtes qui nous entourent quand quelques cailloux claquent plus loin. C'est le signe qu'une chevraie d'isards s'élance en face avec le même objectif que nous, dextérité et vitesse en plus. A titre personnel, je me rassure en me disant que seule la vingtaine de kilos que je tracte m'empêche d'en faire autant. Loin d'être ridicules face aux bestiaux, nous rejoignons la hourquette cible... 15 minutes plus tard. On en profite pour avaler quelques barres de céréales mais surtout pour constater que le col, ouvert aux quatre vents, débouche sur... une abrupte falaise. Infranchissable pour les modestes bipèdes que nous sommes.



Il faut donc rebrousser chemin - sans honte ni regret - pour atteindre un colet oublié 1 heure avant dans la cuvette d'à côté : le port du Pla D'Aube (2432 m). Rien de grave, aucun refuge ne nous attend ce soir et la soupe n'y sera donc pas froide.



Le franchissement de ce dernier obstacle français nous ouvre la voie des vertes moquettes espagnoles du Val d'Ara. Nous les dévalons sans délai pour nous nicher dans une petite rade du rio local et prendre le premier déjeuner collectif du trip. Le pain est encore frais et accueille les larges et habituelles rondelles de saucisson. Les salades en boite - merveilles de l'industrie agro-alimentaire - deviennent par contre chaque année un peu plus infâme. Un peu de rouquin fait passer leurs vils arômes et on apprécie toujours plus un verre de rouge à 2000 mètres qu'à 200 mètres d'altitude...


De quoi nous redonner le courage nécessaire pour attaquer la remontée du vallon, qui devrait nous occuper la fin de journée. 

Le ciel est depuis ce matin à tendance azur mais le vent a déjà commencé à assembler le puzzle des nuages au-dessus de nos têtes; la soirée pourrait être agitée...




Le long zigzag au milieu des vaches ibères nous amène au bout du vallon et au pied de la dernière et majeure difficulté de la journée : un escalier monumental à trois paliers (et autant de lacs) qui devrait nous mener au lieu de bivouac prévu : le lac de Bramatuero Alto (2500 m) D'ailleurs, deux "raiders" espagnols confirment à notre navigateur basque (et bilingue) que le chemin sera "muy longo".


Dès lors, la série de squats que nous inflige les escaliers de caillasse supplicie le groupe. Il y a 7 heures qu'on crapahute et les quadriceps de Peïo se crispent et le crampent. Le landais serre les dents, devant se rappeler aussi de nos précédentes odyssées et des bons moments qu'elles savent aussi réserver.

Pour ne rien arranger, dans cette zone finalement peu fréquentée, on cherche en permanence un chemin qui semble ne pas exister. On prendrai bien le temps de bâtir quelques cairns mais comme le ciel se bouche, on préfère enchaîner. Le premier lac atteint amène une certaine satisfaction, mais surtout la vue de la raillère qu'il faut se taper pour atteindre le second. Et les raillères, comme dit le basque, c'est "un pas en avant, deux pas en arrière" (sic) : des flancs dégoulinant de pierraille de petit calibre qui vous écoeure en efforts vains.



A la sortie de ce marécage granitique, la technicité d'un passage saupoudre même la troupe d'un poil de stress et Patrice, plus habitué aux joutes rugbystiques qu'à celles des sommets, se tend quelque peu dans le raidillon que nous espérons final.

C'est l'heure de la débauche quand une goutte, puis deux, puis une averse glacée s'abat sur le groupe. Il ne faut pas traîner pour nous protéger; ce soir il n'y aura pas de refuge pour nous réchauffer et le dernier col n'est pas encore en vue. On bâche tant bien que mal nos sacs, énormes et augmentés des tentes Quechua. D'autant que le vent de dos pulse fort et gonfle nos ponchos comme s'il s'agissait de voiles. On avance à tâtons dans la pierraille et pour ajouter un peu de fraîcheur au tableau, on traverse même un reliquat de névé à l'approche du point le plus haut de la journée, le Collado del Letrero (2600 m). Bientôt 19H00 et on bascule vers le dernier lac alors que la (première) averse se calme sous le regard curieux d'une nouvelle harde d'isards. 


On pousse l'escapade jusqu'à trouver d'accueillantes murettes qui protégeront le bivouac 100% sauvage de notre première nuitée.

Une innovation qu'il nous tardait d'inaugurer même si on cherche en vain d'idéaux greens d'herbe grasse. A près de 2500 mètres d'altitude, il ne fallait pas rêver. A peine le temps de déployer les Quechua et une première giboulée nous invite à débrieffer la journée deux par deux, en intérieur. Nous sommes satisfaits de cette première étape mais la soirée est aussi sombre que sobre. Les mornes monts nous enserrent, le crasseux plafond nuageux nous écrase, le moral est bas sur ce haut plateau espagnol.


On profite d'une accalmie pour nous réchauffer de quelques "noodles" pris à la hâte, mais c'est déjà l'heure du dessert et une dernière récidive orageuse nous précipite sous nos toiles.On s'échoue pour une nuit presque aussi fatigante que la journée; nous avons dû rentrer nos affaires sous la toile et passons notre sommeillons tassés, matraqués par les averses, et endoloris par la piètre qualité du « sommier » granitique. Nous rêvons tous au même soleil qui seul pourra sauver la journée de demain, voir le reste du trip.

A suivre...

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